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« On ne saurait tolérer le renforcement du pouvoir présidentiel sans renforcer celui du Parlement » - 13 juillet 2018

Dans une cette tribune dans le « Monde », nous, les députés du groupe Agir, expliquons que si la réforme constitutionnelle voulue par Emmanuel Macron permet de renforcer le pouvoir exécutif, elle oublie en revanche de renforcer le pouvoir législatif.

 

Un régime présidentiel ? Chiche !  

 

S'il adoptait la révision constitutionnelle qui est actuellement débattue, le Congrès procéderait ainsi à la 25ème modification de la Constitution de la Vème République depuis 1958.

Finalement c'est sa relative plasticité qui a permis à la Constitution voulue par le général De Gaulle de traverser le temps puisqu'elle sera dans cinq ans la plus vieille Constitution de toute l' histoire de la République.  

 

Pour autant, les révisions successives ont progressivement gommé l'esprit des origines. Que reste-t-il du Président gardien des institutions et arbitre voulu par le Général ? Mais n'est-ce pas de Gaulle lui-même qui, dès 1962 avec l' élection du président de la République au suffrage universel direct, modifiait l' équilibre des pouvoirs en faisant du Président le vrai patron de l' exécutif ? Cet équilibre allait d'ailleurs encore se modifier après le vote en 2000 du quinquennat qui permet l' alignement et la concomitance de l'élection législative et de l'élection présidentielle au bénéfice de cette dernière qui devient l'élection phare déterminant désormais systématiquement la majorité à l'Assemblée. 

 

Fort d' une majorité qui lui doit son élection, le Président est depuis 2002 totalement libre de gouverner. A l'origine de 80 % des lois, le pouvoir exécutif est, de fait sinon de droit, devenu le véritable législateur en France. Les Parlementaires sont priés de voter. Malheur aux frondeurs. 

 

Et voilà qu'incidemment, au détour d'une phrase, le Président demande désormais à pouvoir entrer dans l'arène parlementaire en participant aux débats du Congrès après avoir adressé chaque année son "discours sur l'état de l'Union". 

 

Faut-il s'y opposer? Nous ne le pensons pas. Pourquoi ? Simplement parce que cela va dans le sens de l'Histoire débutée dès 1962 avec la présidentialisation  du régime. 

 

Toutefois, il convient de prendre la dimension de l' ensemble de ces changements et d'exiger les contreparties nécessaires à l' équilibre démocratique. En effet, de John Locke à Montesquieu, les pères de la Démocratie moderne ont tous fait de la séparation et de l'équilibre  des pouvoirs un enjeu de la survie même de la Démocratie. Aux États-Unis, première constitution moderne au monde et exemple typique de régime présidentiel, l'équilibre des pouvoirs s'est incarné par les "check and balances" ou mécanismes qui permettent au pouvoir d'arrêter le pouvoir. 

 

Si la réforme constitutionnelle voulue par Emmanuel Macron permet justement de renforcer le pouvoir judiciaire en procédant à l'indépendance des parquets, elle oublie en revanche de renforcer le pouvoir législatif. Or on ne saurait tolérer le renforcement du pouvoir présidentiel sans renforcer parallèlement celui du Parlement.  

 

L' enjeu ne porte pas sur le nombre de Députés ou de Sénateurs. L'enjeu tient à leur rôle. Au sens de leur mandat. 

 

C' est pourquoi nous proposons, afin de préserver l' équilibre des pouvoirs de voter quatre réformes essentielles :

 

-          La première proposition consisterait à limiter l' usage de la dissolution de l' Assemblée nationale par le Président aux cas de crise majeure avec blocage du pays où il serait nécessaire de redonner la parole au Peuple. 

 

-          La deuxième proposition consisterait à élargir le champ de la loi. Les Français savent-ils par exemple que le code de la route dépend du seul Gouvernement et que le Premier ministre peut seul un matin décider par décret de fixer la limitation de vitesse sur les routes à 80 km/h sans même un mot au Parlement ? Est-ce normal ? Nous ne le pensons pas. 

 

-          La troisième proposition consisterait, elle, à réserver, comme aux États-Unis, le monopole d'initiative de la loi au Parlement. Pour introduire un texte, le gouvernement devrait donc passer par un accord avec le groupe majoritaire de l' Assemblée nationale qui retrouverait ainsi un rôle central dans la déclinaison de son programme politique. Les ministères produiraient moins de normes. Les députés et sénateurs veilleraient à ce que les normes produites au Parlement soient plus en phase avec la réalité du terrain et les aspirations des Français. 

 

-          Enfin, la quatrième proposition consisterait à fusionner le Conseil économique, social et environnemental avec le Sénat pour faire de ce nouveau Sénat une chambre législative plus forte également chargée d' évaluer l'impact des lois sur les générations futures. 

 

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